Nous allons commencer cette note par un énième coup de gueule, signe d’un certain raz-le-bol, on peut même parler de colère, contre les éditeurs et distributeurs français de films non-anglo-saxons. Le film dont il va être question ici a une fois encore, comme tous les films récents critiqués sur ce blog depuis son ouverture, été traduit de l’anglais. Et l’éditeur a été si fainéant qu’il ne s’est même pas la peine de traduire en français les crédits sur la jaquette du DVD.
Mais il y a pire: le DVD en question ne contient que la version française. Pas de VO, pas de sous-titres, même traduits de l’anglais. Il faut donc supporter les voix d’acteurs qui font le minimum syndical (on les comprend, vu le tarif auquel ils sont payés pour les doublages), et donc une traduction boiteuse qui nous forcera à admettre que le moine Lavr, l’un des personnages principaux, s’appelle « Laurent ». Or les Laurent, c’est comme les Stéphane ou les Robert, c’est bien connu, ça court les rues, en Russie.
Enfin, on notera que la fainéantise de cet éditeur lui fait conserver le titre anglais du film: Vamps (au lieu de Les Vampires, en russe Вурдалаки). Or c’est un fait, en France, les Vamps, c’est ça, et pas autre chose:
Donc voilà, il s’est encore trouvé un éditeur sagouin, et un traducteur (ou plus probablement un cabinet de traduction) sans éthique professionnelle, pour saloper un film.
Mais parlons dudit film, maintenant.
Au XVIIIe siècle, Andreï, un jeune officier russe, est envoyé avec son serviteur aux confins de l’empire, dans un monastère situé au point précis où se rencontrent l’empire ottoman, l’empire autrichien et la Russie impériale, autrement dit, en plein coeur des Carpates ukrainiennes. Il doit y retrouver Lavr, un moine exilé, pour lui proposer de rentrer à la capitale et d’occuper un poste autrement plus prestigieux. Mais curieusement le moine refuse, et pour cause: il a pris la défense des villageois, lesquels ont fort à faire pour combattre des vampires dont le maître réside dans un château situé du côté autrichien de la vallée.
Andreï va d’abord essayer de convaincre Lavr, mais, tombé amoureux d’une jeune bergère, Milena, il va prendre fait et cause pour les villageois, tandis que le maître, lui se prépare à accomplir un rituel qui devrait lui permettre de faire vivre les vampires à la lumière du jour.
Soyons honnêtes, Les Vampires n’est clairement pas un film convaincant. Certes l’image est belle, mais est trop souvent artificielle. Ainsi les scènes nocturnes éclairées au projecteur ne sont guère crédibles. Décors et costumes sont honnêtes, mais toujours un peu trop neufs. De plus les « anciens », une classe de vampires supérieure, ont un aspect clairement ridicule – mais au moins leur maquillage et leurs vêtements pourront resservir pour un film de science-fiction dystopique.
Cependant, le plus gros problème reste le scénario. Non pas qu’il soit mal construit ou qu’il souffre d’incohérences, non. Le problème est qu’il n’est absolument pas original. On peut même en donner la source: il s’agit une fois encore de la série américaine Buffy, plus exactement de la saison 1. Là encore, il y est question d’un maître, qui, après des décennies d’absence, revient, mais est encore limité. Il doit accomplir un rituel particulier, prédit par une prophétie, pour se libérer et être à même de ravager le monde. Pour cela, il a besoin d’une créature particulière (le Juste des Justes dans Buffy, Milena, dans ce film), mais il est combattu par de vaillants adversaires dont l’un possède la force (Buffy / Andreï) et l’autre le savoir (Giles / Lavr). Et du coup, on se retrouve avec des choses curieuses. On sait bien qu’au XVIIIe siècle, l’Empire russe est encore arriéré par rapport au reste de l’Europe, mais peut-on penser qu’on y utilise encore des arbalètes – capables de tirer plusieurs carreaux à la fois – comme arme de guerre, dans un monastère, qui plus est? Ah mais oui, mais Buffy l’a bien fait, elle!
Un tel schéma se retrouvait d’ailleurs déjà dans Les Gardiens de la nuit, autre film russe sorti en 2016. Mais le film d’Emilis Vėlyvis était autrement mieux troussé.
Au final, Les Vampires est un film qui se regarde sans ennui, mais aussi sans passion. Et quand l’éditeur français donne comme slogan au film « Combattre le mal n’a jamais été aussi terrifiant », là aussi il se moque du monde.